C’est sous la canicule qu’un groupe de 24 jeunes est arrivé à Cahors pour un séjour d’une semaine – du 23 au 30 juillet -, à l’initiative de l’association Roudel de Toulouse. Ces jeunes de 14 à 18 ans, viennent pour tiers de France, de Serbie et d’Allemagne à la faveur d’un partenariat entre différents acteurs européens. Leur projet est de travailler sur l’interculturel à partir du théâtre et de la vidéo, autour des valeurs de « respect et reconnaissance ».
En étudiant leur lieu de villégiature, l’association s’est intéressée à l’histoire de Cahors Mundi et a souhaité inclure les valeurs humanistes de la ville dans leur réflexion. Il sera ainsi proposé aux jeunes de s’enregistrer comme Citoyen.ne.s du Monde « pour manifester leur intérêt de dépasser les intérêts particuliers ou nationalistes afin de servir l’intérêt de la communauté mondiale et le respect de la dignité humaine ».
L’historien Michel Auvray (1) a rencontré ces jeunes le temps d’une intervention-discussion sur Cahors Mundi et la Mondialisation du Lot, le samedi 27 juillet à 16 h, à l’auberge de jeunesse « Le Chai », à côté du Pont Valentré.
La mondialisation de Cahors
L’occasion est ainsi donnée de commémorer l’anniversaire de la signature de la « Charte de mondialisation » de Cahors, qui lançait ainsi au monde, le 30 juillet 1949 (2), un appel à la solidarité des peuples qui a enflammé les consciences. Par cet acte, Cahors se déclarait symboliquement territoire mondial lié à la communauté mondiale, soutenant le projet d’une planète sans frontières régie par une loi mondiale, en prenant le nom de « Cahors Mundi » : « Nous voulons travailler en paix avec toutes les villes et communes du Monde, coopérer avec elles afin de fonder la Loi mondiale qui assurera notre protection commune, sous l’autorité d’un pouvoir fédéral mondial démocratiquement établi et contrôlé. »
L’initiative de Cahors, première à signer cette Charte, fut suivie les mois suivants par 239 communes sur les 330 que comptait alors le département du Lot, puis par le département lui-même, et, dans une vingtaine de pays, par près d’un millier de territoires, villes, communes, départements, régions – et même un État (le Minnesota). Près de 200.000 personnes se sont enregistrées Citoyen.ne.s du Monde (3).
Le désir d’humanité
Le 24 mai dernier Jean-Marc Vayssouze, maire de Cahors, aux côtés d’Angèle Préville, sénatrice du Lot, déclarait devant le Pont Valentré, à l’occasion de l’inauguration de la Borne de la « Route sans frontières n° 1 » : « Si l’envie d’une citoyenneté mondiale semble avoir perdu du terrain parmi nos semblables, l’enjeu d’une humanité en paix, habitée de l’idée simple qu’elle est une et indivisible, devrait pourtant être capable de l’emporter. »
Il rappela qu’elle était la valeur originelle de la mondialisation portée par Cahors Mundi, aujourd’hui dévoyée par la compétition économique : « Loin d’uniformiser les cultures, de banaliser les différences, de mettre en compétition les peuples, la mondialisation d’alors était d’abord l’expression d’un monde dans lequel devaient triompher les idéaux de paix. Dévoyée, devenue l’instrument d’une économie débridée, d’une compétition déloyale et exacerbée, la mondialisation est désormais synonyme d’excès. Il revient aux générations présentes et futures de faire la preuve que peuvent cohabiter le désir d’humanité, libéré des frontières, et l’ancrage du local, celui qui forme les repères. Gageons que les défis du présent, celui du climat et de l’environnement, par nature transnational, sauront redonner vie à la citoyenneté mondiale. (4) »
Citoyenneté mondiale
La schizophrénie de la représentation nationale, qui devance les préconisations de l’Europe libérale en avalisant le CETA, les accords de libre échanges entre le Canada et la France, alors qu’elle reçoit dans la même journée Greta Thunberg, porte-voix prophétique des générations futures, montre la difficulté des États-nations à mettre en œuvre les politiques nécessaires à lutter contre le changement climatique face à leurs impératifs de croissance et à la compétition internationale, comme si les intérêts économiques s’avéraient plus importants que la survie de l’humanité et de la nature.
Pareillement, la misère du plus grand nombre face à la richesse d’une minorité, les pollutions, l’accaparement et le gaspillage des ressources énergétiques fossiles et des matières premières rares, l’explosion démographique, les migrations, le désordre monétaire, le surarmement, la perte de la biodiversité, sont autant de problèmes qui se posent à l’échelle planétaire et qui dépassent la seule responsabilité des États.
À l’exemple de Cahors Mundi, le temps est venu pour chacun de reconnaître sa citoyenneté mondiale et d’exiger la mise en place d’institutions supranationales fondées sur la démocratie et le respect de tous.
1) – Michel Auvray est l’auteur de l’ouvrage à paraître : « Citoyens du Monde. D’Hiroshima à Cahors Mundi, un idéal en action » (titre sous réserves de modifications).
2) – Le 30 juillet 1949, le Conseil municipal, nouvellement élu, adoptait la Charte mise au point par le « Centre de Recherches et d’Expression Mondialiste » par 20 voix et 7 abstentions. Lors d’une consultation populaire qui permit de réunir 70 % du corps électoral, 59 % des électeurs inscrits se prononcèrent pour la mondialisation de Cahors, confirmant le vote du Conseil municipal. 11 % s’abstenaient.
3) – L’histoire de Cahors Mundi et de la mondialisation du Lot est racontée sur le site : http://lotoisdumonde.fr.
4) – Le 21 mai dernier, le conseil municipal de Cahors a voté à l’unanimité son adhésion à l’association des Maires pour la Paix – Association Française des Communes, Départements et Régions pour la Paix (AFCDRP).
Article en ligne : http://lotoisdumonde.fr/communes/signature-cahors-mundi.html.
et à télécharger ici : http://lotoisdumonde.fr/communes/CP-Cahors-Mundi-a-70-ans.pdf